Chroniques du jeu, des joueurs et des matches d’avant.

Pour une esthétique éternelle du football, de ses enjeux, de ses libéros et de ses 5-3-2.

dimanche 9 mars 2014

LIBERO(S) GRANDE

Baresi, Ondrus, Koeman, Trésor, Zmuda, Pezzey et Demol furent tous titulaires de patronymes farfelus. Coïncidence ? Non, car ces défenseurs techniques et « libérés de tout marquage » sont les symboles de la popularité du poste de libéro dans les décennies 70 et 80.


Bruno Pezzey, Argentina '78


BARESI, TRESOR, PEZZEY

Bruno Pezzey : Uruguayen ? Italien ? Suisse ? Autrichien. Vainqueur de la coupe de l’UEFA avec l’Eintracht Francfort, auteur d’un but contre l’Irlande du Nord lors de la coupe du monde 82, Bruno le Germain est décédé en jouant au hockey-sur-glace un 31 décembre, à Innsbruck. À 34 jours de son quarantième anniversaire. Car libéro, c’est non seulement un poste à porter un nom baroque, mais c’est aussi courir le risque de foncer vers une issue tragique.


Marius Trésor : la Guadeloupe apporte un bloc de vaillance, de courage et d’intelligence à une défense française en reconstruction. C’est la pierre angulaire défensive sur laquelle Hidalgo va bâtir son glorieux édifice. Six ans plus tard, en Andalousie via Marseille et Bordeaux, Trésor frappe une volée pleine lucarne un soir d’été en 1982. Un don de Dieu, un cadeau, un trésor ! Sacré Marius.


Franco Baresi. Rides à 25 ans, dos courbé, calvitie et nuque épaisse : un physique des Dolomites du type qui ne déconne pas avec la ligne de hors-jeu et les relances de 60 mètres. Un style seigneurial imprime la légende du libero qui joue bas dans le Milan AC de Sacchi qui joue (très) haut. Mais même sans adversaire direct, Franco « bas-résilles » était collant.



KOEMAN, DEMOL, ZMUDA

Le pauvre Wladislaw Zmuda a attendu d’avoir 28 bougies sur le gâteau avant que l’administration de son pays l’autorise à exercer son métier dans le « monde libre ». Homme de goût, Wladi, 91 sélections et quatre coupes du monde au compteur (co-recordman), pose son sac à Vérone (Hellas). Affaibli par les blessures, il ne défend que sept fois en deux saisons les couleurs d’un club qui remportera le championnat l’année suivant son départ. « Meilleur jeune » de la Weltmeisterschaft 74, médaille d’argent aux J.O. deux ans après, brillant troisième du Mundial 82, Zmuda a été le dénominateur commun des grandes équipes de Pologne qui se sont succédé entre 1974 et 1986.

Ronald Koeman : l’homme-chibre à la frappe de titan (Barcelone-Sampdoria) a toujours su rallier à lui les esprits (Marcelo) salaces. Après tout, mieux vaut en avoir une dure que « Demol ». Stéphane est un grand voyageur révélé au cours de l’ahurissante rencontre du Mondial 86 qui vit la Belgique terrasser l’ogre soviétique 4 buts à 3. L’Anderlechtois a ensuite (joué et) emménagé à Bologne, Porto, Toulouse, Braga, Athènes (Panionios), Toulon, Liège, Bruges et Lugano en moins de dix ans !


SUPPLEMENT « EUROFOOT 76 » : ANTON ONDRUS

En demi-finale de l’Euro 76, Anton Ondrus est le capitaine de la Tchécoslovaquie qui défie les footballeurs totaux des Pays-Bas, vice-champions du monde en titre. Il ouvre le score d’une tête imparable de 15 mètres au quart d’heure de jeu. Son équipe est réduite à dix trois quart d’heure plus tard. Les Tchèques courbent l’échine. Dans leur style caractéristique, avec fougue et détermination, les Hollandais poussent. À la 73ème, Willy Van de Kerkhof, alerté par Wim Jensen, déborde et centre au cordeau. Le ballon rebondit sur le genou de l’ami Ondrus qui expédie le cuir dans ses propres filets. C’est le fameux classique « tor-eigentor ».

Anton a les boules. Heureusement, Neeskens est exclu à son tour trois minutes plus tard. L’orage orange passe, mais pas la pluie dans le ciel dans le stade Maksimir. Fin du temps réglementaire. Le valeureux Van Hanegem laisse ses coéquipiers à neuf. Un contre assassin smashé par Nehoda, puis un dernier pour conclure de Vezely scellent le sort des favoris bataves en toute fin de prolongation. Quatre jours plus tard, Antonin Panenka inscrit son nom dans l’histoire en inventant un genre de tir fouetté à effet rétro synonyme de victoire finale face à la République Fédérale Allemande championne du monde et d’Europe en titre. Anton Ondrus soulève la coupe. Sept ans plus tard, il signe à Thonon-les-Bains, division 2, groupe B du championnat de France.